Homme, humain, cultivateur, réflexions autour du terme juste

Dans la Toile du vivant, après avoir placé sur la table les quatre éléments terre, eau, soleil, air essentiels à la vie, les participants découvrent la plante cultivée et l’Homme qui en prend soin. A chaque fois, je me dis que cette carte L’Homme doit être renommée car elle me gène à plusieurs niveaux :

1- Pourquoi l’homme et pas la femme ? La remarque revient régulièrement, je m’en sors en stipulant qu’il s’agit de l’homme en général. Mais je reconnais le sexisme de l’intitulé et suis tenté de renommer la carte en L’humain.

2- Pourquoi l’humain et pas seulement certains humains ? Tout comme l’expression Anthropocène laisse à croire que l’ensemble des humains partagent la responsabilité des changements géophysiques de la planète, alors que certains lui préfèrent les expressions Industrialocène, Capitalocène ou Plantationocène, pourquoi affubler l’humain en général de la pratique agricole alors que certains peuples ont vécu et vivent encore sans l’agriculture ? Pour avoir lu Homo Domesticus de James C Scott et Au commencement était... de David Graeber et David Wengrow – entre autres ouvrages – j’ai conscience qu’humanité et agriculture tissent depuis des millénaires des liens complexes fortement corrélés aux cultures politiques des groupes humains.

En écrivant cela je me rend compte que cette histoire nécessite en elle-même une toile spécifique, tant les implications de ce que les anthropologues révèlent remettent en cause la narration progressiste ambiante incarnée par exemple par l’auteur d’Homo Sapiens, Yuval Noah Harari. J’inscris sur mes tablettes : travailler sur une toile des débuts de l’agriculture…

La carte homme de la toile du vivant devient humain pour éviter le sexisme du terme

3- Si le terme humain ne convient pas, alors quoi ? Cultivateur, agriculteur, paysan… ? Pour moi deux inconvénients : je retombe dans un problème de genre et ces termes restent connotés politiquement. Autant j’assume un parti pris sur le verso des cartes quand il s’agit de les intégrer dans une narration, autant je souhaite que les visuels demeurent assez génériques pour s’intégrer dans plusieurs toiles, nous y reviendrons.

Plusieurs carte du jeu de sensibilisation à l'agroécologie la toile du vivant

Conclusion : aucune solution satisfaisante ne me vient à l’esprit pour le moment, donc pour l’instant, je renomme la carte L’homme en L’humain et j’utilise le terme Le cultivateur au verso de la carte pour l’utiliser dans la narration de la Toile du vivant.

trop tard pour agir dans l’urgence !

Cette réflexion me conforte dans la volonté de développer de nombreuses toiles intriquées, tant les concepts culturels à déconstruire se révèlent complexes et longs à appréhender. Contrairement à ce que suggère le slogan de la Fresque du climat, après trois heures d’atelier vous restez très loin d’avoir toutes les cartes en main pour effleurer l’ampleur du problème. Il est trop tard pour agir dans l’urgence !

Il me semble que d’un outil construit collectivement, à la manière de Wikipédia, émergera une réflexion collective plus large, préalable indispensable à une prise de conscience massive et profonde permettant d’envisager des actions pertinentes.

A suivre …